Robert (10.11.2021)
Ce sont les petits détails qui constituent la vie de quelqu’un.
Qui transforment quelqu’un en individu, avec ses habitudes, ses préférences, ses passions.
Quand j’écris des biographies, des portraits, ce sont ces petits détails que je cherche et qui m’attirent. Ce sont ces petits détails dont j’ai besoin pour avoir une idée plus précise de quelqu’un. Simone de Beauvoir, par exemple, n’aimait pas le fromage et ne fumait pas vraiment, elle clopait. Françoise Sagan buvait toujours de l’alcool fort et n’aimait pas beaucoup prendre de bains de soleil.
Cette semaine, j’apprends des petits détails de la vie de Robert Schuman.
Dans la maison de famille de Robert Schuman, ils sont partout, ces petits détails que j’adore. Des photos de représentants royaux, une loupe sur le bureau, une croix à côté du lit, un transistor avec une réception internationale, un canapé en cuir noir qui tranche avec le reste du mobilier. Et, bien sûr, des livres. Des livres partout. Des livres dans plusieurs langues.
Loïck, qui a gentiment accepté d’être mon guide privé, m’indique quelque chose dans une vitrine. J’ai envie de pousser des cris de joie : ils sont là, les quatre tomes du roman Les Mandarins. Elle est là, Simone de Beauvoir, ma Simone, dans cette vitrine, au milieu des livres de Schuman ! Moi, je suis devant la vitrine, une image en tête : Schuman, assis derrière son bureau ou confortablement dans un fauteuil, Les Mandarins en main, le regard concentré. Est-ce que ce roman lui a plu ? L’écriture de Simone de Beauvoir ? Je pourrais aussi imaginer cela : discuter de littérature avec Robert Schuman.
Oh, Robert.
Pendant mes études, Robert Schuman était un homme presque mythique, un des pères fondateurs de la construction européenne et un pionnier de l’amitié franco-allemand. Il était un de ces grands hommes qu’on commémore et qui sont presque devenus des monuments.
Mais Robert, il n’est ni un mythe, ni un monument. Il était un homme avec un cœur français et une âme européenne. Il était aussi un homme qui dormait dans un lit incroyablement petit – Loïck est persuadé qu’il dormait en position assise, comme les rois.