S’habiller en tenue d’infirmière et enfiler ses sabots.
6 heures. S’habiller en tenue d’infirmière et enfiler ses sabots. Vérifier stylos, ciseaux, prendre stéthoscope, sparadrap, pince à clamper, pense-bête, garrot. S’attacher les cheveux. Marcher en pensant à la fin du service, à ce qu’on fera le soir si on n’est pas trop épuisée. Se laver les mains. Piétiner pour préparer son chariot, se courber sans prendre soin de plier les jambes. Se laver les mains. Faire le plein de tubulures, aiguilles, seringues, médicaments, mais aussi draps, alèses, haricots, bassins… Porter le tout dans ses bras car le chariot a encore disparu. Jurer de se plaindre sachant que c’est en vain. Sentir ses pieds chauffer sur les semelles dures. Le pied lâche, se tord. Ne pas tomber, pas le temps. Se laver les mains.
Réveiller brutalement les patients. Etre désolée, mais pas le temps de faire autrement. Faire dix prises de sang en priant pour ne pas se piquer avec une aiguille souillée. Se raconter, entre collègues, l’extérieur, n’importe quoi mais l’extérieur. Se laver les mains.
Préparer les perfusions debout. Se laver les mains. Ouvrir les bouteilles d’antibiotiques et d’antalgiques avec les ciseaux car les laboratoires n’ont pas pensé que quelqu’un devait les ouvrir avant de les injecter. Se blesser. Se soigner. Et enchaîner car pas le temps. Se laver les mains. Laver le corps d’un autre, homme ou femme. Se pencher, soulever les jambes. Le dos tire. Pas le temps. Se laver les mains.
Faire le lit au carré, seule ou avec l’aide-soignante. Soulever le matelas. Le dos craque. Les jambes courent, trois sonnettes en même temps. Aller au plus urgent. Une patiente âgée est tombée dans la douche. Se pencher, soulever, glisser, tomber, un autre bleu, appeler à l’aide, se débrouiller car personne n’est disponible. Ramener la patiente dans son lit, hisser le corps pour mettre la tête sur l’oreiller. Rassurer, il n’y a pas de mal. S’asseoir, lui prendre la main, et rire ensemble. Se laver les mains.